Comment distinguer la subvention versée à une association d'un marché public ?

Mis à jour le 27 mai 2025
Rédigé par Roxane Hidoux

La frontière entre subvention et marché public est parfois difficile à établir, ce qui expose l'association à un risque de requalification.

Quelle est la différence entre une subvention et un marché public ?

Une subvention publique est une contribution financière versée par une collectivité à une association pour financer un projet dont elle est à l'origine, sans aucune contrepartie.

Un marché public est un contrat passé par une collectivité, pour satisfaire à ses besoins en matière de services, travaux et fournitures contre paiement d'un prix.

La distinction est importante car le régime juridique et fiscal d'un marché public est bien plus contraignant que celui d'une subvention (dont les modalités sont exposées dans le Guide pratique de l'association 2025).

Comment éviter la requalification d'une subvention en marché public ?

Le juge administratif assure un contrôle étroit des conditions d'utilisation des subventions et n'hésite pas à requalifier des subventions en marché public, à l’occasion d’un recours par l’opposition municipale, par le Préfet à l’occasion de son contrôle de légalité, par des concurrents ou des citoyens.

Mais même si la convention signée entre une collectivité locale et une association s'intitule formellement « convention de subventionnement », le juge administratif a toujours la faculté de la requalifier en contrat de marché public.

Pour éviter la requalification de la subvention en marché public :

  • l'association doit être à l'initiative du projet, l'avoir défini elle-même et être responsable de sa mise en œuvre ;
  • la subvention ne doit pas constituer la rémunération de prestations individualisées répondant aux besoins des autorités ou organismes qui les accordent. L'existence d'une contrepartie directe et strictement proportionnée à la valeur de la prestation peut aboutir à la requalification de la subvention en marché public.

Par ailleurs, si la collectivité demande une véritable prestation de services à l'association ou qu'elle exige des services très précisément définis quant à leurs modalités d'action et pas seulement dans les objectifs définis en commun, il existe un risque de requalification de la subvention en marché public.

La cour de discipline budgétaire et financière a ainsi requalifié une subvention versée par la chambre d'agriculture de la Gironde en marché public de prestations de services, dans la mesure où la convention de subvention visait à répondre aux besoins propres de la chambre d'agriculture, qu'elle-même avait définis, et moyennant un prix fixé sous la forme d'un versement forfaitaire annuel (Cour de discipline budgétaire et financière, 2e section, 22 février 2019 n° 231.770).

L'association peut toutefois échapper à la requalification de la subvention en marché public si :

  • elle n'opère pas sur un marché concurrentiel. C'est généralement le cas des associations intervenant dans les domaines de l'insertion, de l'enseignement ou de la formation, du portage de repas...
  • elle porte depuis le début le projet. En effet, c'est le fait de répondre à un besoin exprimé par l'administration pour elle-même qui permet de différencier les marchés publics des conventions qui accompagnent certaines subventions.

Quelles sont les conséquences de la requalification d'une subvention en marché public ?

Les sanctions encourues par la collectivité

Une opération relevant de la commande publique qui n'aurait pas fait l'objet d'un marché public est constitutive du délit d'octroi d'avantages injustifiés ou délit de favoritisme.

Il est puni de 2 ans d'emprisonnement et d'une amende de 200 000 €, dont le montant peut être porté au double du produit tiré de l'infraction (article 432-14 du Code pénal).

La requalification d'une subvention en marché public peut également faire l'objet d'une demande indemnitaire de la part d'un concurrent s'estimant évincé de la conclusion d'un tel contrat.

Les sanctions encourues par l'association

Il est important pour l’association de s’assurer que les sommes qu’elle reçoit de la part des collectivités publiques constituent bien des « subventions » au sens juridique.

Les sanctions découlant d'une requalification d'une subvention en marché public sont nombreuses :

  • le Tribunal administratif peut annuler la délibération ayant attribué la subvention ;
  • l'association doit reverser à la collectivité territoriale la subvention si celle-ci a déjà été attribuée ;
  • la requalification implique un assujettissement à la TVA des sommes en question. En effet, si les subventions sont exonérées de TVA, tel n'est pas le cas des services réalisés dans le cadre d'un marché public.

Certaines associations encourent des sanctions supplémentaires : les associations qui constituent un « pouvoir adjudicateur » et les associations qui interviennent dans un secteur concurrentiel.

Les associations qui constituent un "pouvoir adjudicateur"

Les associations créées pour satisfaire des besoins d’intérêt général particuliers et placées sous le contrôle d’une ou plusieurs collectivités locales constituent un "pouvoir adjudicateur".

Cela vise les associations :

  • financées majoritairement par les collectivités,
  • dont l’organe d’administration, de direction ou de surveillance est composé de membres dont plus de la moitié sont désignés par les collectivités,
  • ou, dont la gestion est contrôlée par les collectivités.

Ces associations - qui bien souvent ignorent leur qualité de "pouvoir adjudicateur" - sont passibles de sanctions pénales lourdes (délit de favoritisme) en cas de requalification d'une subvention en marché public.

Les sanctions sont encourues aussi bien par les dirigeants de l’association, ou ceux qui bénéficient d’une délégation de pouvoirs, que par l’association elle-même, pour laquelle les peines encourues sont quintuplées.

Les associations qui interviennent dans un secteur concurrentiel

La requalification d'une subvention en marché public peut avoir un autre effet : la subvention peut être qualifiée "d'aide d'Etat".

La majorité des associations pensent que leur statut associatif les prémunit contre de tels risques, en pensant, à tort, que seules les sociétés commerciales sont concernées par la législation sur la concurrence et les aides d’Etat. Or, cette règlementation vise aussi les associations qui interviennent dans un secteur concurrentiel.

L’une des sanctions consiste à devoir rembourser intégralement toutes les aides reçues de manière irrégulière.