© Ministère de l'Intérieur/F.BALSAMO
Entretien avec Marlène Schiappa, ministre déléguée auprès du ministre de l'Intérieur, chargée de la Citoyenneté, au sujet de la proposition de loi confortant le respect des principes de la République - aussi appelée projet de loi sur le séparatisme - qui prévoit notamment la mise en place d’un contrat d’engagement républicain et qui étend la responsabilité des dirigeants d’association.
Que répondez-vous aux associations ou au HCVA qui disent que le contrat d'engagement républicain n'apporte en réalité rien de plus à ce qui existe déjà ?
Notre volonté ? Pas un euro d’argent public aux ennemis de la République ! Nous souhaitons renforcer l’encadrement des subventions attribuées aux associations par les collectivités publiques ou toute autre personne chargée de la gestion d’un service public afin de s'assurer que ces moyens mis librement à leur disposition soient employés dans le respect des principes républicains que sont la liberté, l’égalité, la fraternité, le respect de la dignité de la personne humaine…, qui seront déclinés dans un contrat d’engagement républicain et en consultation avec l’ensemble du mouvement associatif.
Le contrat d’engagement républicain est un outil protecteur qui garantit la liberté d’association et ne permettra d’entraver que les associations qui dévoient ce statut pour véhiculer une forme de séparatisme et pour s’organiser contre la République et ses valeurs. L’intention du projet de loi confortant le respect des principes républicains est justement d’éviter l’amalgame entre les associations qui participent de l’offre républicaine et celles qui véhiculent le séparatisme. Le contrat d’engagement républicain protège les associations de ceux qui veulent dévoyer ce statut, c’est un outil de protection pour les élus et les associations.
Les associations loi 1901 offrent un espace de liberté et d’action, tout en étant un pilier de la cohésion sociale et de la vie démocratique de notre pays. Nous en connaissons les forces pour le maillage territorial, intergénérationnel et l’animation de la société civile. Mais cette force peut révéler des faiblesses lorsque des associations sont instrumentalisées pour diffuser des idéologies portant atteinte aux valeurs de la République. Il est du devoir des autorités publiques de prémunir la société contre de tels détournements et dérives, a fortiori lorsque des subventions publiques sont accordées aux associations. Certaines associations justifient, notamment par des considérations religieuses, l’infériorité d’une personne, le refus de certains droits, en raison de son sexe, de son orientation sexuelle, de son identité de genre, de son appartenance réelle ou supposée à une ethnie, ou à une religion déterminée. Qui peut trouver normal que ces associations soient subventionnées avec de l’argent public ?
L’avis rendu par le Conseil d’État a d’ailleurs souligné l’équilibre et la sagesse du dispositif proposé. Il faut rappeler que ce contrat ne s'applique qu'aux associations qui sollicitent des subventions. Si une autorité publique finance une association, il est légitime qu'elle exige d'elle le respect des principes républicains. Les associations militantes, les lanceuses d'alerte, les associations d’inspiration religieuse sont utiles à notre pays et ne sont pas concernées. Seules le sont les associations qui, par exemple, prôneraient les discriminations, mèneraient des actions violentes à l’encontre de mineurs, ou encore auraient des pratiques relatives à des dérives sectaires, le sont.
Mais pourquoi ce contrat ne concerne que les associations et non toutes les personnes morales qui perçoivent des financements publics ?
Les fondations sont concernées au même titre que les associations. Les fonds de dotation ne peuvent pas recevoir de subventions, il est donc logique que ce dispositif ne leur soit pas applicable. Un autre article du projet de loi prévoit, cependant, le renforcement du contrôle du fonctionnement et du financement des fonds de dotation afin de prévenir notamment les dérives des financements étrangers. Les subventions aux associations représentent, pour le seul État, plus de 6,5 milliards €. Le montant précis attribué par les collectivités territoriales n'est pas précisément connu mais il est plus important encore. Il est légitime que cet argent public soit utilisé à bon escient et surtout, qu'il ne permette pas de financer des activités contraires aux principes républicains afin de protéger au mieux tous les citoyens et, en premier lieu, la quasi-totalité des associations qui respectent tous les jours les principes républicains.
L'article 8 de la proposition de loi prévoit également de mettre en cause une association pour, dans certains cas, l'agissement de ses membres. N'y a-t-il pas un risque de mettre abusivement en cause des associations ?
Le mécanisme précisé dans l’article 8 reste de portée limitée ; en effet, il faut que les agissements reprochés à un ou plusieurs membres de l’association soient clairement commis en qualité de membres de ladite association qui se prévalent de leur appartenance, ou que ces agissements soient directement liés aux activités de l’association. L'Etat peut d’ores et déjà dissoudre des associations dans certaines conditions très précises. Il l'a fait encore récemment, que ce soit pour des associations diffusant une idéologie islamiste radicale ou des groupuscules d'extrême droite violents. Toutefois, la législation en question est datée et doit être modernisée, dans le respect entier de la liberté d'association. Les associations visées sont une infime minorité, mais nous devons nous défendre contre ces quelques associations dangereuses. Cette disposition sera totalement transparente pour la quasi-totalité d'entre elles.
-> A lire sur notre site : Cette loi qui sème le trouble parmi les associations