Hellfest : le documentaire “L'Enfer des anges” à (re)voir en replay

A quelques jours de la 10e édition du Hellfest, “L'Enfer des anges” raconte le plus grand festival français de musiques extrêmes à travers le regard de deux habitants de Clisson. Avec poésie, et loin de tout cliché. Disponible en replay jusqu'au 19 juin.

Par Marie-Hélène Soenen

Publié le 15 juin 2015 à 14h23

Mis à jour le 08 décembre 2020 à 05h41

Face au site encore désert du Hellfest, paisible prairie au repos, Stéphane ramasse des « jetons boissons », reliques de l'édition passée. A 17 ans, le jeune homme est un fou de musique metal et attend avec impatience le démarrage du Hellfest, pour lequel il a longuement économisé. Sa casquette du festival vissée sur la tête, il se remémore l'emplacement exact de chaque stand, de chaque scène.

Christine, pétulante quinquagénaire, s'apprête elle à accueillir sa bande de festivaliers, des métalleux bons vivants qui installent chaque année leur campement dans son impasse. Pour rien au monde elle ne renoncerait à ce rituel convivial fait de rigolades et d'apéros.

Un ado mordu de metal et une quinqua pas métalleuse pour un sou : c'est à travers ces deux Clissonnais que Véronique Escolano et Terence Leroy-Beaulieu ont choisi d'évoquer le raout qui vient secouer la campagne nantaise chaque mois de juin depuis 2006.

Pendant trois jours, la belle Clisson, 6 900 habitants, voit sa population exploser. L'édition 2014 a attiré près de 150 000 festivaliers. Film sensible et poétique, L'Enfer des anges prend le temps de comprendre comment se passe cette cohabitation, loin du ton parfois sensationnaliste d'une télé qui aime se focaliser sur l'imagerie funèbre du metal et surfer sur les fantasmes qu'il suscite.

© Clement Mahoudeau/ IP3

Les réalisateurs ont commencé à tourner en 2013, armés de petites caméras 5D, d'une bonne dose de débrouille (les vues aériennes du site ont été prises de la grande roue qui le surplombe, les plans de Stéphane sur sa mobylette, du coffre d'une Citroën...) mais surtout d'une honorable curiosité journalistique. Sur le terrain, ils ont croisé l'équipe de Zone Interdite qui a fabriqué un reportage désastreux, bourré de clichés, axé sur les nuisances du festival et son apparence diabolique. L'écart de traitement est stupéfiant. « Il y a évidemment du bruit, comme dans tout festival, commente Terence Leroy-Beaulieu. Mais il n'y a que 30 gendarmes à Clisson pendant le Hellfest, pour 70 000 personnes qui déambulent dans la ville tous les jours. Et il ne s'y passe rien de méchant. »

Monté sans voix-off, L'Enfer des anges, n'évoque pas les polémiques, et ne s'attarde pas sur l'opposition de certains religieux et croyants blessés dans leur foi. Le sujet affleure ici et là, subtilement, lorsque la caméra se glisse dans le cortège loufoque de la « Paradise Fest », une grosse farce montée en 2013 par une association locale pour tourner en dérision les détracteurs du festival, ou dans les propos réfléchis du jeune Stéphane, qui incarne à merveille la communauté des métalleux.

La caméra capte joliment sa passion viscérale, son caractère posé et sa douceur. Pour lui, qui se lance sans hésiter dans les circle pits, ces courses circulaires effrénées auxquelles s'adonnent les métalleux pour se marrer, le metal est un exutoire. Le « slam », qui consiste à se faire porter à bouts de bras par la foule, un moyen de faire corps avec la « famille metal ».

Véronique Escolano et Terence Leroy-Beaulieu ont commencé par interroger une foule d'intervenants, des responsables locaux au curé de Clisson, en passant par le sociologue Gérôme Guibert, qui a fait du metal son sujet d'étude. Ils ont finalement choisi de resserrer le documentaire sur ces deux personnages qui renferment en eux toute la richesse humaine du festival, et dont le vécu illustre les relations fortes qui se tissent dans cet improbable choc des cultures.

« La fusion entre ces deux mondes, Clissonnais et festivaliers, a commencé en 2008. Il a plu énormément, les métalleux étaient couverts de boue. Les habitants ont eu mal au cœur et ont mis à leur disposition des machines à laver, leur ont fait du café. On s'est demandé comment raconter ce lien », explique Terence Leroy-Beaulieu. Et quel meilleur exemple que Christine et Dominique, Clissonnais qui ont appris à connaître les métalleux au point de ne plus pouvoir s'en passer (et Christine, visiblement, à aimer les foulards têtes de mort) ?

Avec délicatesse et humour, L'Enfer des anges restitue l'essence du Hellfest : un rassemblement festif de passionnés venus vibrer sur le même son. Ni plus, ni moins. « C'est le Disneyland du metal !, s'amuse Terence Leroy-Beaulieu. Les gens viennent de tous bords, pratiquent toutes les religions, et ils s'en fichent. C'est de l'amour. Pour moi, les métalleux sont beaucoup plus tolérants que les 3/4 des amateurs de musique. Catho ou pas, et alors ? Ils sont ancrés dans leur passion », commente Terence Leroy-Beaulieu, qui s'est lui-même laissé happer par l'esprit metal... et a acheté son pass pour la 10e édition qui s'ouvre le 19 juin.

L'Enfer des anges, documentaire de Véronique Escolano et Terence Leroy-Beaulieu, le 13 juin à 15h20 sur France 3 Pays-de-la-Loire, Bretagne et Paris Île-de-France. Le 19 juin à 8h50 sur France 3 Pays-de-la-Loire, Bretagne, Haute et Basse-Normandie, Paris Île-de-France et Centre.

France 3 Pays-de-la-Loire est accessible partout en France par satellite (CanalSat 369, Fransat 314, TNT Sat 320) et
ADSL (Bbox 189, Bouygues 489, Free/Orange/SFR 320, Darty 311, Numericable la Box : 929).

L'Enfer des Anges sera disponible sur francetvpluzz pendant 7 jours (rubrique régions).

Sur le même thème

Le magazine en format numérique

Lire le magazine

Les plus lus